Inaptitude physique de l’agent en CDI et obligation de reclassement.

Par Marie-Line Bourges-Bonnat
Publié le

Lorsqu’un agent n’est plus apte physiquement à exercer ses fonctions, il est impossible pour l’employeur public de procéder à son licenciement sans avoir au préalable recherché son reclassement professionnel.

Inaptitude physique de l’agent en CDI et obligation de reclassement.


Le reclassement professionnel pour inaptitude physique est ainsi prévu dans les trois fonctions publiques (fonction publique d’Etat/fonction publique territoriale/fonction publique hospitalière).


Il constitue par ailleurs un principe général de droit, et s’applique donc non seulement aux fonctionnaires, mais aussi aux agents contractuels.


Dans un arrêt du 13 juin 2016, le Conseil d’Etat est venu préciser les conditions dans lesquelles l’obligation de reclassement d’un agent recruté en CDI pouvait être considérée comme remplie.



Les faits et la procédure:


L’affaire concernait une assistante maternelle recrutée en CDI par la Ville de Paris, et licenciée pour inaptitude physique.


Suite à ce licenciement, la Ville l’avait recrutée en CDD, cette fois sur un poste d’animatrice, et pour effectuer un remplacement.


L’agent, s’estimant lésée, a pris l’initiative d’une procédure dirigée non seulement contre la décision de licenciement, mais aussi contre le nouveau contrat (en considérant devoir bénéficier d’un CDI, et non d’un CDD).


Elle a obtenu gain de cause en première instance devant le tribunal administratif de Paris.


En appel, la Cour administrative d’appel de Paris a confirmé l’illégalité du licenciement, mais a considéré que les règles relatives au recrutement dans la fonction publique imposaient à l’employeur de ne proposer qu’un CDD à l’agent.


C’est dans ce contexte que le Conseil d’Etat a dû se prononcer sur la question suivante : l’obligation de reclassement d’un agent en CDI peut-elle être considérée comme remplie avec une proposition de CDD ?




Les  interrogations soulevées par le litige :


Le litige présentait la particularité de se rapporter à deux cadres juridiques distincts :




  • D’une part, celui tenant aux conditions de reclassement d’un agent recruté en CDI devenu inapte physiquement  ;

  • D’autre part, celui tenant aux conditions dans lesquelles un agent peut être recruté en CDD.


Plus précisément, l’article 3 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale prévoit le recours au CDD dans des cas bien particuliers, correspondant à l’hypothèse d’un accroissement temporaire d’activité.


C’est sur cette disposition que se fondait la Ville pour soutenir que puisqu’un poste correspondant à un simple remplacement avait été trouvé, elle n’avait pas d’autre solution pour respecter les règles relatives au recrutement des agents que de proposer un CDD, quand bien même l’agent était au préalable en CDI.



La solution : les caractéristiques du contrat doivent être maintenues dans le cadre du reclassement professionnel.


A l’évidence, le poste d’animatrice proposé à l’agent correspondait bien, puisqu’il s’agissait de répondre à un besoin temporaire, à un recrutement en CDD.


Pour autant, le Conseil d’Etat a fait le choix de faire prévaloir les droits de l’agent.


La haute juridiction a ainsi rappelé que l’obligation de reclassement était un principe général de droit applicable aux agents contractuels de droit public.


Il a ensuite affirmé que lorsqu’un tel agent bénéficie de droits créés par son contrat de recrutement, de telle sorte que lorsqu’il dispose d’un CDI, cette caractéristique doit être maintenue, et ce sans que les règles relatives au recrutement puissent s’y opposer.


L’arrêt est donc clair : l’obligation de reclassement vis-à-vis d’un agent en CDI n’est pas remplie en lui proposant un CDD, et ce indépendamment des caractéristiques du poste proposé.


L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris a donc été annulé au motif qu’une erreur de droit avait été commise.


CE, 13 juin 2016, n°387373
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